TROP D’IMPÔT TUE L’IMPOT. SUITE ET PAS FIN.
Une hausse trop importante d’impôts provoque une chute de l’activité et donc…une baisse des entrées d’impôts. La démonstration a été faite par le cabinet Oliver Wyman pour les Echos avec la taxation des services à la personne qui provoque…une baisse des recettes fiscales pour l’Etat. Du grand n’importe quoi !
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L’augmentation du coût horaire entraîne une baisse de l’activité déclarée.
Le gisement d’emplois non réalisé coûte aux finances publiques.
A l’heure où l’Etat cherche à remplir ses caisses par tous les moyens afin de réduire les déficits publics, les mesures prises depuis 2010 visant à taxer les activités de services à la personne démontrent par l’absurde comment… il peut en perdre ! C’est le terrible constat que dresse une étude à laquelle « Les Echos » ont eu accès, et au titre éloquent, « Les services à la personne : pourquoi ça ne marche pas mieux ? » A l’initiative et cofinancée par la Fédération des entreprises de services à la personne (FESP), elle a été réalisée par le cabinet Oliver Wyman qui, sur la base de documents et de chiffres officiels et publics, a évalué quinze ans d’initiatives publiques.
Et le bilan est sans appel : « si rien n’est fait pour relancer la dynamique d’un secteur aux gisements d’emplois inexploités, en 2016 la France reviendra dans le domaine des services à la personne à la situation d’avant 2005 », alerte Bruno Despujol, « partner » chez Oliver Wyman et auteur de l’étude. En clair, à la situation d’avant le plan Borloo, lequel avait, notamment, relevé le plafond de réduction d’impôt de 10.000 à 12.000 euros, à laquelle s’ajoutaient des majorations en fonction de la composition du foyer.
« Dégradation du cadre fiscal »
Avec d’autres dispositions favorables au secteur, il aura permis au marché d’enregistrer une croissance annuelle moyenne de la valeur ajoutée de 8 % par an, avec la création de 390.000 emplois déclarés, tandis que le travail informel passait de 40 % à 30 % entre 2005 et 2011, relève l’étude d’Oliver Wyman. Mais, depuis 2010, une série de mesures prises (dont, cette année-là, la suppression de l’exonération de 15 points de charges patronales pour les particuliers employeurs) ont pesé sur son développement.
A tel point, qu’ « aujourd’hui une tendance dégressive s’installe avec une baisse de l’activité déclarée de 11 % entre 2011 et 2013 », constate Bruno Despujol. Selon la dernière note publiée par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss), en glissement annuel, la baisse du volume horaire déclaré est passée de 2,1 %, au premier trimestre 2012, à 3,9 % au quatrième trimestre, et 7,9 % au premier trimestre 2013.L’auteur de l’étude observe que « la dégradation du cadre fiscal induite par les mesures prises depuis 2010 a entraîné une hausse moyenne du coût des prestations pour les ménages employeurs d’environ 10 % ».
Or, ce que les services de l’Etat n’ont pas mesuré en évaluant les gains escomptés de l’ensemble de ces mesures, de l’ordre de 1 milliard d’euros, c’est la grande sensibilité au prix des ménages. Oliver Wyman démontre dans son étude que l’ « élasticité prix » est de 1, c’est-à-dire que « quand on augmente le prix de 10 %, le volume baisse de 10 % ». L’augmentation attendue d’environ 10 % du coût horaire entre 2013 et 2016 laisse donc présager la persistance de la baisse.
Résultat, le gisement de 170.000 emplois d’ici à 2016, évalué par de nombreux travaux d’experts et d’institutions, restera non réalisé. Et Oliver Wyman calcule le manque à gagner annuel pour les finances publiques à 2,1 milliards, qui sont liés aux effets directs d’un demandeur d’emploi (allocations chômage, frais d’accompagnement), auxquels s’ajoutent pour 2,8 milliards les effets indirects (perte de revenus liés aux cotisations sociales des employeurs et des travailleurs, et à la fiscalité), soit potentiellement 4,9 milliards.
En France, où les entreprises ne captent que 3 % du marché, alors que c’est en moyenne 26 % en Europe, « les pouvoirs publics doivent être plus incubateurs que régulateurs dans ces nouveaux secteurs d’activité », conclut Bruno Despujol.
Antoine Boudet
extrait d’un article sur Les Echos le 11 juillet 2013